Communiqué au sujet de la loi sur « la lutte contre les dérives sectaires »
MISE À JOUR DU 16 FEVRIER 2024
Nous avons été alertés par certains d’entre vous, et nous les remercions, d’une nuance apportée par un sous-amendement du groupe SOCIALISTE et apparentés, dans l’article 4 qui nous avait échappé.
Il ne change pas fondamentalement l’article mais permet au juge de déterminer s’il y a ou non constitution du délit. Nous corrigeons donc notre communiqué (corrections en couleur dans le texte)
Nous rappelons néanmoins que ce texte est encore toujours provisoire (il doit passer encore par la CMP) et que dans tous les cas, nous participerons à toute saisine auprès du Conseil Constitutionnel par des élus de la République.
L’article 4 du projet de loi prétendument destiné à renforcer les dérives sectaires, refusé par le Sénat, réintroduit par la Commission des lois, rejeté par l’Assemblée nationale a été réintroduit par un amendement finalement adopté ce 14 février 2024.
L’association BonSens.org, après étude détaillée de ces nouvelles dispositions, se réserve la possibilité de participer à sa demande de retrait en cas de saisine du Conseil Constitutionnel.
Nous ferons un communiqué plus complet dans la journée, mais voici déjà nos premières réflexions sur ce qui a été voté hier par l’Assemblée.
Nous attirons l’attention de nos lecteurs qu’avant d’être voté cet article 4 a été largement édulcoré par les législateurs au vu des vives critiques justifiées qu’il avait suscitées.
Dans le texte provisoire du projet de loi, le nouvel article 4 voté précise que la « provocation » à s’abstenir de suivre un traitement doit avoir été faite « au moyen de pressions ou de manœuvres réitérées de toute personne atteinte d’une pathologie » et précise dans un alinéa que le délit peut ne pas être constitué si ladite provocation « s’accompagne d’une information claire et complète quant aux conséquences pour la santé et que les conditions dans lesquelles cette provocation a été faite ne remettent pas en cause la volonté libre et éclairée de la personne« .
« Art. 223‑1‑2. – Est punie d’un an d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende la provocation au moyen de pressions ou de manœuvres réitérées de toute personne atteinte d’une pathologie à abandonner ou à s’abstenir de suivre un traitement médical thérapeutique ou prophylactique, lorsque cet abandon ou cette abstention est présenté comme bénéfique pour la santé des personnes visées alors qu’il est, en l’état des connaissances médicales, manifestement susceptible d’entraîner pour elle, compte tenu de la pathologie dont elles sont atteintes, des conséquences particulièrement graves pour sa santé physique ou psychique. »
» Lorsque la provocation s’accompagne d’une information claire et complète quant aux conséquences pour la santé et que les conditions dans lesquelles cette provocation a été faite ne remettent pas en cause la volonté libre et éclairée de la personne, les délits définis au présent article peuvent ne pas être constitués. »
De plus, un dernier alinéa écarte les lanceurs d’alerte.
» L’information signalée ou divulguée par le lanceur d’alerte dans les conditions prévues à l’article 6 de la loi n° 2016‑1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique ne constitue pas une provocation au sens du présent article. »
Cette modification par sous-amendement par le groupe SOCIALISTE et apparentés est assez sournoisement justifié ainsi. Il « vise à laisser une marge d’appréciation au juge dans les cas où une information aura accompagné la provocation visée par l’article 4. Le juge pourra dans ces cas apprécier si le délit est constitué ou non. Une simple exclusion n’apparait pas pertinente. Aussi ce sous-amendement permettra-t-il au juge, en cas d’informations délivrées, d’estimer que les délits ne sont pas constitués ; et la loi lui ménagera également la possibilité d’estimer le contraire. »
Néanmoins, le délit est caractérisé pour des pressions individuelles sur une personne.
En conséquence, une étude ou un avis argumenté publié mettant en doute l’efficacité d’un traitement ou une alerte sur la dangerosité d’un traitement n’entrent plus dans le champ du délit, à la différence de la rédaction initiale.
Mais il s’agit d’une cause d’irresponsabilité subjective de l’auteur de l’infraction qui sera donc apprécier subjectivement par le juge avec tous les risques d’appréciations divergentes que cela implique.
Nous attendons désormais la version finale du texte qui devra être votée prochainement à l’Assemblée à la suite de la proposition de la Commission Mixte Paritaire (CMP).
Rappelons que le Sénat avait jugé bon de faire disparaitre cet article 4. Il faudra que la CMP se mette d’accord sur un texte consensuel. A ce jour, la composition de cette CMP n’est pas connue.